Comprendre les troubles liés à la maladie et en parler

Les troubles liés à la maladie d’Alzheimer sont nombreux et souvent difficiles à vivre au quotidien pour la personne malade et son entourage. Communiquer, expliquer, identifier les réponses adaptées à apporter, c’est leur donner les moyens de les vivre moins douloureusement.

Les signes de la maladie : l’écoute des proches pour un diagnostic éclairé

En tant que médecin traitant et interlocuteur privilégié, vous jouez un rôle essentiel dans le dépistage précoce des premiers signes de la maladie. N’hésitez pas à vous appuyer sur les commentaires de l’entourage sur les changements de comportement de leur proche, ils sont une aide précieuse pour poser précocement votre diagnostic.

« Il paraît essentiel de questionner les proches pour mieux prendre soin de son patient car le patient lui-même n’est plus capable de raconter sa vie. Il va raconter sa vie avec des trous, avec des mensonges qui pour lui n’en sont pas. Il ne se rend plus compte qu’il vous raconte une vie qu’il ne vit plus ».

Agnès, 51 ans, accompagne sa maman Marcelline qui vit avec la maladie d’Alzheimer depuis 6 ans.

S’ils ne sont pas tous présents au début de la maladie, certains peuvent vous alerter et vous engager à la prescription d’examens complémentaires.
La perte de la mémoire immédiate ou amnésie :
Les oublis répétés concernant des évènements récents alors que les souvenirs anciens restent intacts sont les premières manifestations de la maladie comme le confirme Monique, 65 ans, qui vit depuis 2 ans avec la maladie d’Alzheimer : « Je ne comprends pas, je me souviens parfaitement des souvenirs de mon passé comme si c’était hier. Dans le présent, j’ai le sentiment que ma mémoire est comme une passoire, rien ne veut rester. ». Puis ces pertes de mémoire vont progressivement toucher les épisodes de plus en plus anciens.

Les troubles du langage ou aphasie :
Après les troubles de la mémoire, les troubles du langage apparaissent de manière insidieuse, progressive mais discrète. Au début, trouver le « bon » mot est ardu, la personne va faire alors des périphrases ou employer un mot pour un autre mais au fil du temps comprendre ce qui est dit puis parler devient difficile. Le vocabulaire se réduit à quelques mots isolés, les phrases deviennent de plus en plus courtes et le langage peut devenir un jargon sans aucun sens pouvant aller jusqu’à la perte totale de communication.

Les difficultés à accomplir les tâches familières ou apraxie
Préparer le repas, mettre et débarrasser la table, faire la vaisselle, faire les courses, s’habiller, se déshabiller, gérer ses médicaments, son budget, tous ces gestes simples et naturels oubliés doivent être à nouveau explicités pour être exécutés puisque plus rien n’est évident comme l‘explique Agnès :« il faut rappeler les gestes du quotidien, par exemple pour la douche , il faut mentionner toutes les étapes : se mouiller, se savonner , se rincer et se sécher. »

L’incapacité à reconnaître les objets et les visages ou agnosie
Peu à peu la personne malade ne peut plus identifier les messages de l’environnement, elle ne reconnaît pas ce qu’elle voit et peut adopter des attitudes d’indifférence ou d’agressivité.
Dans ce contexte, l’entourage doit savoir qu’il peut privilégier les autres sens pour rentrer en communication avec son proche par exemple identifier un objet par le toucher ou reconnaître un proche en écoutant sa voix.

Et encore mieux que des mots, cette vidéo « Donnons la parole aux patients » de France Alzheimer

Les émotions face aux troubles du quotidien

Faire l’expérience de la vie avec une maladie d’Alzheimer est une épreuve émotionnelle qui entraine de nombreux bouleversements dans le quotidien de la personne et de son entourage.
La perte des capacités physiques et intellectuelles, les pertes de mémoire sont vécues douloureusement et altèrent estime et confiance en soi.
Savoir que la vie « d’avant » va disparaitre au fil des années, se sentir diminué (e), plus vulnérable éveille des réactions de colère, tristesse, peur, angoisse.
Pour les proches, la dépersonnalisation de l’être aimé accentuée par l’inversion des rôles à laquelle oblige la maladie est très perturbant.

« Cette maladie nous prive de nos souvenirs. »  « Je me sentais comme un boulet dans la société et je ne voyais plus mes amis, je me disais qu’est-ce que je vais faire maintenant à radoter, à les embêter ».

Philippe, 70 ans, vit avec la maladie d’Alzheimer depuis 3 ans.

« La maladie efface l’identité, c’est ce qui se perd en premier ».

Lysiane, 78 ans, qui vit avec la maladie d’Alzheimer depuis 3 ans.

« Personne n’est jamais préparé à devenir la maman de sa maman, personne ne peut imaginer cette inversion des rôles ».

Agnès, 51 ans, accompagne sa maman Marcelline qui vit avec la maladie d’Alzheimer depuis 6 ans.

Ce changement de rôle questionne aussi le couple comme le mentionne Michèle, 75 ans, épouse de Georges qui vit depuis 2 ans avec la maladie d’Alzheimer : « Ce n’est plus un rôle d’épouse, c’est un rôle d’aide-soignante, d’accompagnatrice, tout sauf un rôle d’épouse. ».
Votre rôle de professionnel de santé est d’entendre ces difficultés, de libérer la parole et/ou de trouver un espace d’expression pour la personne malade et son aidant.

Nous vous suggérons quelques solutions à relayer :
• La plateforme téléphonique : Allo Alzheimer 0970 818 806 est ouverte spécifiquement le soir de 20h à 22h, 7 jours sur 7. Pour plus d’informations cliquez ici.
• Le pôle régional des maladies neurodégénératives a mis en place une plateforme téléphonique pour aider 7 jours sur 7 les « aidants » d’Occitanie, découvrez-la en cliquant ici.
• A côté des dispositifs en ligne, vous pouvez aussi leur conseiller de rejoindre les cafés des aidants : ce sont des espaces d’information et de partage, destinés à tous les aidants, quels que soient l’âge et la pathologie du proche qu’ils accompagnent. Ils permettent de réfléchir sur la place de chacun dans la relation d’aide, prendre conscience en tant qu’aidant des limites de son investissement, comprendre les comportements de son proche et ses réactions face à certaines situations. Écoutez les témoignages

et retrouvez les coordonnées des Cafés des Aidants sur l’Occitanie en cliquant ici.
• Ils peuvent aussi se tourner vers un (e) psychologue pour un entretien personnalisé :

Les proches face à la maladie : expliquer pour faire face

Les changements de personnalité et de comportement de son proche sont les manifestations de la maladie d’Alzheimer les plus difficiles à supporter pour l’entourage.
Au fil du temps, ne pouvant plus mettre de mots sur son angoisse, ses difficultés, la personne va s’exprimer autrement et l’agressivité peut devenir le mode d’expression de son mal être.
En tant que médecin traitant, il vous revient d’apporter les conseils nécessaires pour apprendre aux proches à décrypter le sens de ces nouveaux comportements et adopter une posture bienveillante.
Nous en avons répertorié certains à leur transmettre s’ils vous paraissent adaptés à leur contexte :
• chercher à identifier l’élément déclencheur des mouvements d’agressivité afin d’éviter qu’ils ne se reproduisent,
• ne jamais répondre à l’agressivité par de l’agressivité,
• réduire les sources d’anxiété ou d’agitation comme des changements ou des nouveautés dans le mode de vie,
• prévoir des promenades et un exercice régulier et proposer à son proche un dispositif de géolocalisation. Mais vous pouvez surtout rappeler que ces changements de comportement ne sont pas intentionnels et qu’il est important de ne pas se sentir personnellement agressé (e) .

Quelques astuces à partager pour mieux vivre les troubles au quotidien

S’il existe de nombreux troubles et contraintes pour la personne et son entourage dans la gestion de la maladie, sachez qu’il existe aussi un certain nombre d’astuces pour faciliter leur quotidien.
Nous en avons répertorié certaines à leur transmettre si elles vous paraissent adaptées à leurs problématiques :
• Pour les pertes de mémoire :
– noter les choses importantes dans un agenda et le garder avec soi tout le temps,
– pour ne pas manquer les prises des médicaments à des heures précises, penser aux piluliers,
– afficher près du téléphone, les numéros de téléphone importants,
– solliciter un membre de sa famille ou un ami pour rappeler l’heure d’un repas, d’un rendez-vous ou la prise de médicaments,
– avoir des photos des personnes familières et inscrire sur chaque photo le nom de la personne,
– rayer les jours sur un calendrier, pour se souvenir de la date et marquer à chaque jour les évènements importants,
– étiqueter si nécessaire les armoires, les tiroirs, les objets à l’aide de mots ou d’images pour vous souvenir à quoi ils servent.

• Pour les troubles du langage :
– 
quand les mots ne font plus sens, communiquer différemment avec son proche, privilégier la communication non verbale : un geste tendre, un regard, un sourire.

• Pour les troubles de l’orientation et la peur de se perdre :
mettre dans la poche du vêtement de son proche ou dans son sac à main une carte indiquant sa maladie et la personne à contacter en cas de besoin ainsi qu’un plan du quartier.

Penser aux outils de géolocalisation, sous forme de téléphone, de montre, de ceinture ou encore de médaillon, ils permettent à l’entourage de connaître la position géographique de leur proche pour lui venir en aide en cas de chute par exemple.